Est-ce le début de la démondialisation ? La guerre en Ukraine pourrait marquer le troisième et dernier chapitre de la fin de la mondialisation et le début d’une nouvelle ère pour l’économie mondiale.
Lancée il y a 30 ans après l’effondrement de l’Union soviétique, la mondialisation a contribué à rendre le monde “plat”, en reliant le capital aux travailleurs à l’échelle mondiale, en accentuant les spécialisations des pays et en rapprochant les centres de compétences et les grands bassins de main-d’œuvre des marchés de consommation ; elle a permis à des milliards de personnes de sortir de la pauvreté, en particulier en Chine.
3 chocs successifs ont stoppé la marche en avant de la mondialisation et l’ont inversée. Premièrement, le soutien politique à la mondialisation s’est considérablement érodé. Les populistes et les nationalistes aux États-Unis et en Europe ont fait de l’érection de barrières au libre-échange et à l’immigration une priorité de l’agenda politique. Donald Trump a changé de paradigme au sein du parti républicain en imposant des droits de douane sur diverses importations. Le mouvement des gilets jaunes en France a mis en lumière la précarité des travailleurs faiblement rémunérés qui doivent faire face à la concurrence immédiate d’autres travailleurs dans les pays en développement. Deuxièmement, la pandémie de COVID a révélé la fragilité de nos économies en raison de leur interdépendance. Tout à coup, les citoyens américains et français se sont rendu compte qu’il n’était plus possible de se procurer des masques de protection ou une voiture flambant neuve en raison de perturbations dans les chaînes d’approvisionnement à grande échelle et parce que certains composants stratégiques ne pouvaient plus être obtenus au niveau national, ces industries ayant été délocalisées vers des rivages lointains il y a bien longtemps. Troisièmement, à la suite de la guerre en Ukraine, les pays perçoivent de plus en plus leur interdépendance économique comme une vulnérabilité à laquelle il faut remédier. Les sanctions de grande ampleur que l’Occident impose à l’économie russe pourraient entraîner des coûts substantiels pour l’Europe au cas où la Russie riposterait en restreignant son approvisionnement en gaz naturel et en pétrole. Les gouvernements vont rechercher l’autosuffisance et se désolidariser des liens économiques lorsque ceux-ci représentent un risque.
Que se passera-t-il alors ? Il est probable que la démondialisation conduise à une économie mondiale divisée en deux blocs, l’un orienté vers la Chine et l’autre vers les États-Unis, l’Union européenne se trouvant principalement, mais pas entièrement, dans ce dernier camp, chacun essayant de s’isoler de l’autre et de réduire son influence.
Les conséquences économiques pour le monde seront immenses, à commencer par l’inflation. Pour les entreprises, la relocalisation dans des pays à coûts élevés, la construction de chaînes d’approvisionnement redondantes dans des lieux plus sûrs auront un coût, qui sera supporté par le consommateur. Il pourrait y avoir un déclin ou du moins un ralentissement dans le déploiement des innovations. Dans un monde divisé en blocs, les États veilleront à ce que seuls les alliés aient accès à leurs dernières technologies.
La démondialisation semble aujourd’hui inévitable, tout comme la mondialisation semblait inarrêtable il y a encore quelques années. Les impacts étant encore en cours d’évaluation, la FACC vous tiendra au courant des dernières nouvelles économiques pour nos pays et notre région.